Interview d’Adrien Chalmin, champion d’Europe 2022 de rugby fauteuil et alternant chez Michelin

Adrien a fondé la section handisport à l’ASM et l’association Handischool pour sensibiliser les jeunes au handicap. Il termine à 40 ans un MBA en alternance chez Michelin pour renouer en janvier avec le monde du sport, côté management. L’occasion de faire avec lui, le bilan de son expérience chez Bib.

Bonjour Adrien, quel bilan peux-tu nous faire de ces 3 ans chez Michelin ?

Instructif, une découverte pour moi du monde de l’entreprise malgré mon âge avancé. J’ai un parcours atypique. J’étais dans le sport de haut niveau et auto-entrepreneur avec mon association que j’ai pilotée pendant 10 ans. Je n’ai finalement jamais eu de position en tant qu’employé. C’est très instructif et enrichissant notamment sur la partie managériale, sur l’accompagnement que tout un chacun a droit, avec tous les dispositifs RH auxquels nos managers ont accès pour nous permettre de nous développer. Ce sont des choses que je transposerai facilement dans le monde du sport : le One to One, les entretiens, les fréquent-feedbacks.

Ça ne se fait pas dans le sport ?

Si mais de manière très informelle. Il n’y a pas de continuité. Le simple fait d’inscrire des items de développement pour chaque joueur, en prenant garde qu’ils soient atteignables, mesurables, entre autres, c’est quelque chose que je n’ai pas connu dans le cadre de ma carrière sportive dans le handisport. J’ai également vu la gouvernance de l’entreprise telle qu’elle est, avec les facettes positives et négatives notamment dans les interactions entre les hommes et puis j’ai progressé professionnellement aussi. J’ai occupé un poste de data analyst sans avoir réellement un bagage technique lié à ma formation initiale. J’ai un parcours spécial. Ma formation a commencé avec un DUT d’informatique puis un MBA en management en école de commerce. Du coup j’ai une appétence digitale. Il y a 3 ans, j’ai commencé une alternance chez Michelin. J’ai choisi ce MBA parce que c’était très transverse avec de l’acculturation sur tous les services, achats, RH, finance…et ciblé management et la gestion des hommes.

Tu as joué à l’ASM. Tu as fait jouer ton réseau pour ce contrat d’alternance ou c'est l'ouverture particulière de l'entreprise au handicap avec la mission handicap qui a permis ce contrat ?

Mon réseau par mon parcours sportif, n’a pas joué pour rentrer chez Michelin. En fait lors de la recherche de stage, j’ai fait un post sur Linkedin et j’ai eu plusieurs sollicitations d’entreprise diverses du bassin clermontois : des PME et des grandes entreprises. J’ai passé plusieurs entretiens et chez Michelin avec une personne que je ne connaissais pas pour un poste de data analyst en apprentissage dans leur équipe au sein de la manufacture des talents. J’ai passé d’autres entretiens à la Banque Pop, à la Montagne, au Crédit Agricole après Michelin. Mais quand j’ai vu l’environnement de la manufacture des talents avec la salle de musculation, juste à côté, qui me permettait de m’entraîner sur place pour rester dans le sport de haut niveau. Ça a été comme une évidence. Je dirais que forcément j’ai été porté dans le monde Michelin, par le monde de l’ASM mais je n’ai sollicité personne.

Etais-tu au courant de la politique d'accueil des personnes en situation de handicap de Michelin ?

J’étais conscient de l’existence d’accords sociaux via l’activité de mon association sur l’intégration des personnes RQTH. Par contre, je n’avais pas de connaissances à ce moment-là de la politique de Michelin, de la manufacture des talents.

As-tu eu l'occasion de regarder les différentes politiques sur ce sujet des possibles employeurs (la montagne, la banque pop…) ?

En fait ce n’est pas ce qui a déterminé mon choix.

Comment tu évalues l'accord aujourd'hui ? Est-ce un accord de bon niveau ?

Je mentirais si je disais le connaître par cœur. Bien sûr j’ai très apprécié le don de 2 jours. C’était une agréable surprise très bien pensée. Je suis à 80%. Selon mon expérience, j’ai la capacité de faire 100% mais il me faut choisir mes combats. Bien sûr, j’ai 2 enfants en bas âge mais je fais moins de sport. C’est intéressant de donner du temps à des personnes qui ont des difficultés même si elles ont la capacité de le travailler à 100%. J’ai trouvé ce point très pertinent. J’ai apprécié les dispositifs d’adaptation de mon environnement de travail. Je parle de l’environnement proche et même un peu plus global avec un manufacture les talents où des travaux ont été réalisés pour m’accueillir. La moquette a été changée car elle me gênait pour circuler. Mes particularités ont été prises en compte lors des travaux. C’était toujours bien anticipé. On a toujours trouvé une solution pour que je puisse travailler dans les meilleures conditions. Par ailleurs il y a eu de la continuité dans mon dossier entre mon stage réalisé en 2019 et mon apprentissage en 2022. Michelin avait conservé un historique de mes besoins et c’était hyper cool : pas besoin de redemander. J’ai aimé la transparence aussi à la fois de ma tutrice et de la référente handicap. Être transparent sur ses problèmes, c’est ce que j’ai prôné aussi dans le cadre de mon activité associative. Mais il faut avoir la capacité   d’exprimer ses besoins et ses lacunes. On peut avoir envie de cacher certains besoins invisibles, par gêne, honte ou peur d’être jugé ou mis dans des cases. La plus grande souffrance vient des jugements infondés de personnes avec qui on n’a pas partagé l’information, en raison d’un manque de communication.

Là tu vas bientôt partir, y aura-t-il un dernier rendez-vous pour faire un bilan avec la référente handicap ?

[rires] Elle travaille dans mon équipe donc je la vois tous les jours… j’ai été sollicité pour être ambassadeur handicap. Je trouve que c’est très intéressant mais je suis sorti de mon association Handischool qui sensibilise au handicap, justement par lassitude. J’ai eu besoin à un moment de couper dans l’immédiat.

Quelles sont pour toi les forces et les faiblesses du monde Michelin ?

La force, je dirais la bienveillance dans l’accompagnement managérial et la faiblesse, je mettrai la bienveillance dans l’accompagnement managérial. Parfois il y a trop de bienveillance mais c’est probablement aussi parce que je viens du monde du sport où un coach est plus dur.  L’autre point positif, c’est la notion de transparence. Mon manager nous transmet toutes les informations pour qu’on puisse exercer nos fonctions dans les meilleures conditions. Elle a été très inspirante dans l’accompagnement avec tous les dispositifs RH qui sont mis en place. C’est quand même incroyable d’avoir cette relation one-to-one avec ton manager une fois par mois, de mettre en place des dynamiques que tu retrouves dans le monde du sport. J’ai aussi trouvé très intéressante et très pertinente aussi l’approche par les compétences.  Quel est mon niveau actuel et quel est le cap visé et ce que je mets en place pour atteindre ce cap. C’est une approche très cartésienne beaucoup moins subjective qu’un jugement. Ça demande une réflexion avec le manager et de mettre en place quelque chose pour se développer. Cela ressemble au test physique des sportifs et qui va permettre de mettre en place un programme de préparation de physique.  

En janvier, tu vas quitter Michelin pour un projet qui mêle le sport et le management, qu’as-tu en tête ?

Aujourd’hui, j’ai plein d’idées que je me refuse d’écrire pour terminer correctement ma mission. Je pars tout en sachant que je pourrais, pourquoi pas, revenir un jour.

Propos recueillis par Chris Boyer, élu Cfdt

As-tu eu l’occasion de regarder les différentes
politiques sur ce sujet des possibles employeurs (la montagne, la banque pop…) ?

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