Bullshit management : une affection très contagieuse

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Le monde de l’entreprise semble bien souffrir d’un écart grandissant entre un discours lénifiant du management et un ressenti bien moins rose des salariés.

Le bullshit management, également connu sous le nom de gestion par le baratin, est une approche caractérisée par son manque de transparence et son utilisation excessive de la communication superficielle et trompeuse. Elle tend à manipuler les opinions et les décisions des personnes de telle sorte qu’elles s’approprient « naturellement » ce qui a déjà été décidé pour elles…et sans elles.

Novlangue seconde langue

Le bullshit management est désormais partout, que ce soit dans les (grandes) entreprises, les gouvernements, les médias ou même dans les relations interpersonnelles. Qui n’a pas entendu parler « d’expérience collaborateur, de talents, d’inclusion, d’agilité, de disruption, de créativité, de positive attitude ou encore de bienveillance, de bonheur au travail, sans oublier les zones de confort dont il faut sortir ou l’éternelle lutte contre les silos » (1) ? L’emploi de l’anglais tend à renforcer l’universalité de cette novlangue : empowerment, create trust, leadership, awareness, feedback…

Dès lors que les pratiques ne suivent pas ce discours enthousiaste de liberté, de responsabilisation, d’encouragement à la prise d’initiative, alors le risque est grand que les salariés perdent le sens de leur travail et rejettent en bloc le progrès pourtant vital pour l’évolution de l’entreprise.

Du rêve à la réalité

L’enquête européenne EWCS, montre qu’en 2021, les salariés français sont ceux qui ressentent le plus leur charge de travail et la pénibilité physique ou psychique de leur poste. Ils décrivent davantage l’incertitude, le manque de reconnaissance voire le mépris …que le bonheur au travail ! Le bullshit management pourrait donc avoir pour effet de dégrader la confiance des salariés envers leurs managers et par là même décrédibiliser la stratégie de leurs dirigeants. L’effet produit serait dès lors complètement contre-productif, tendrait à transformer la vision et le rêve en bad trip et se traduirait par un manque de motivation, une perte de productivité.

La communication est un art délicat. Elle doit certes éclairer et motiver mais ne peut masquer voire travestir la réalité dans un but de manipulation des opinions et des décisions. Se contenter de communiquer peut sembler bénéfique à court terme mais cela ne résiste pas à l’épreuve des faits. Les risques à long terme sont trop grands pour les entreprises ou même la société.

La transparence et l’honnêteté sont des valeurs importantes en matière de management. A la Cfdt, nous sommes persuadés qu’une communication claire, courageuse et honnête favorisera toujours un environnement de travail motivant et productif.

Christophe Le Roux , élu CSE Clermont et délégué syndical

(1) Jean-Marie Charpentier « Les mots de l’entreprise et les mots du travail » Revue Cadres Cfdt N° 498 Octobre 2023

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